MOI, PIERRE RIVIÈRE

"Pierre Rivière ne correspond jamais à l'image attendue par la société. Il déborde et renverse le cadre dans lequel on voudrait le contenir. Foucault, dans la tradition nietzschéenne, pensait qu’une société s’évalue, plutôt que se juge, du point de vue de ses sous-sols et de la façon dont elle traite ses fous, ses délinquants, ses détenus, ses marginaux de toutes sortes. Loin d’être restée dans l’« anonymat », l’histoire de Pierre Rivière fait bien rejaillir, pour reprendre les termes de Michel Foucault, son existence mais plus encore ses « malheurs ». Ce dossier devient très vite celui d’une procédure où la justice mobilise d’autres regards, en particulier celui de la médecine aliéniste, seule à même de pouvoir cerner la personnalité complexe de l’accusé. En effet, l’enjeu majeur qui se dessine dès l’instruction de cette affaire et plus encore à la lumière des premiers interrogatoires de Pierre Rivière et du contenu des écrits qu’il adresse au juge est celui de sa responsabilité pénale. Parlant de lui, les témoins évoquent d’ailleurs un individu « au caractère contrasté, renfermé et taciturne, parfois bizarre, un peu idiot, cruel avec les animaux » (M. Renneville). Soumis à l’analyse des experts, le cas de ce jeune normand divise. Bien que condamné pour parricide à la peine capitale, Pierre Rivière voit son cas réexaminé à l’issue de son procès, à l’appui d’une demande de commutation de peine. L’expertise prend alors toute sa dimension grâce aux conclusions d’un collège de sept médecins qui, au mois de décembre 1835, affirment unanimement que le condamné souffrait bien d’« aliénation mentale ». Cette position, bientôt suivie d’une grâce présidentielle, conduit à commuer la peine de ce jeune homme en réclusion criminelle à perpétuité. Cette dernière, toutefois, sera de courte durée dans la mesure où Pierre Rivière sera retrouvé pendu, cinq ans plus tard, dans son lieu de détention.

Un spectacle en ouverture du colloque Le juge et l’expert : en quête de vérité organisé les 10 et 11 octobre 2024 à la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de l’Université de Lille. Le procès de Caen de novembre 1835 et les enjeux qui en ressortent, notamment sur les progrès et la place de la psychiatrie en France, entrent en résonnance avec ce colloque organisé par le Centre d’Histoire Judiciaire (UMR 8025) les 10 et 11 octobre 2024 à la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de l’Université de Lille. Intitulée Le juge et l’expert : en quête de vérité, cette manifestation scientifique aura pour ambition d’explorer la dimension pénale de l’expertise en croisant les différents regards, aussi bien médicaux que judiciaires."

Nicolas Derasse, professeur de droit à l'Université de Lille
Frédéric Laforgue, directeur artistique Compagnie Les Blouses Bleues

Mise en scène et conception : Frédéric Laforgue

Avec Pierre Cartonnet et Lisa Hours

Chorégraphies : Djibril Ouattara 

Costumes : Enke vandepoel 

Régie générale : Pierrick Lafages

Gratuit sur réservation *